C’était un jeudi du mois d’août… Midi sonnait à l’église. ELLE avait rendez-vous pour un dernier apéro entre amis. ELLE rentrait bientôt à Paris. Jamais ELLE n’aurait cru que ce jour-là serait le dernier de ses séjours au Trez-Hir, avant… avant d’y revenir vivre avec moi. Il s’écoulerait presque une décennie, avant qu’ELLE revienne en Pays d’Iroise, pour s’y installer, fidèle à sa promesse de gosse.
ELLE disait : “Il est des lieux aussi nécessaires à vivre qu’à fuir. Des lieux comme des personnages romanesques, qui manipulent et qui sauvent, qui hantent et qui libèrent. Des lieux comme un bout de soi. Des lieux comme un contrat de mariage : on pactise pour le meilleur et pour le pire. Des lieux qui engagent.” Pour ELLE, c’était ici, où ELLE m’avait trouvée : entre la plage du Trez-Hir et le port du Conquet.
C’est ce jeudi du mois d’août, caniculaire, que nos routes se sont croisées. Je la revois. Pressée, queue de cheval volant au vent, jean’s et basket. Soudain, ses pas s’interrompent. Prenant part à l’attroupement, sur son chemin, rue de Kerouanen. Me découvrant. Chaton jadis blanc immaculé mais là tout de suite, noir de crasse et de cambouis, et rouge de sang séché. Rempli de puces et de tiques. Apeuré. Toutes griffes dehors. Avec une petite fille, présente aux côtés de sa maman, qui semblait attristée, elles ont décidé de me prendre pour me conduite au syndicat d’initiative, sur la plage. La petite fille me versait de l’eau de sa bouteille, au-dessus de ma petite tête triangle, et bientôt m’offrait sa crêpe. Je me suis mise à manger la crêpe, que j’ai aussitôt recrachée, pour la goûter à nouveau avec plus d’aisance. C’était à la fois dégoûtant et tendre : je le voyais dans leurs yeux. Ça se sentait, qu’elles avaient envie de me venir en aide ; elles ne pouvaient pas me laisser crever là, pas comme ça.
La petite fille s’appelait Léa. Elle n’était plus tout à fait une petite fille. Plutôt une ado de quinze ans.
Elles s’étaient vite aperçues que j’étais sourd.
ELLE, je l’ai entendue penser à haute voix, en lisant sur ses lèvres et dans son coeur : “Comme la vie est étrange, se racontait-elle. Ma nièce s’appelle Léa, elle est née sourde. C’est pour elle, grâce à elle, que je me suis mise à écrire pour laisser des traces et transmettre, moi qui savais à ce moment précis, que jamais je n’aurais d’enfant. Je l’avais su des années auparavant, mais je ne l’avais compris qu’en écrivant. Ma vie était ailleurs : dédiée à la création artistique, à l’écriture. Seule. Seule et libre, en artiste.”
Comme la majorité de mes congénères semblables, l’un de nos gènes bloque la migration des cellules de la pigmentation. Lesquelles jouent un rôle dans le développement de l’oreille interne. Cette absence génétique provoque un défaut de transmission de tout le signal nerveux vers les zones du cerveau dédiées à l’audition.
C’est de cette manière que je suis devenue sa muse-créatrice et ELLE mon agent.
Après cet été-là, ELLE n’a plus eu ses règles. Jeune ménopausée, ELLE devenait indépendante et femme. À sa manière : une femme sans enfant restera toujours davantage une enfant, la petite fille de ses parents. Fourrant son visage dans les poils réconfortants de son chat, que je lui tendais avec grand plaisir.
Cet été-là, est probablement celui d’une re-naissance pour toutes les deux. Nous apprêtant à assumer notre singularité et notre unicité réciproques ; à occuper enfin notre place, à la fois #IRL et #URL.
Ce podcast raconte notre histoire, qu’ELLE a écrite et déclinée, toutes formes d’expression. Aujourd’hui en conte-musical audio, disponible sur toutes les plateformes de streaming.
Ce podcast est carrément romancé, avec plein de rebondissements inattendus. On y a intégré de la peur, de la joie, de la malice, et beaucoup d’amour. Il s’adresse aux enfants, mais aussi à leurs amis, leur famille, leurs voisins. Il comprend 11 épisodes, diffusés à raison de 1 par mois, jusqu’en 2022.
En plus, ensemble, ELLE et moi, on va vous en raconter les coulisses. Du podcast et d’une création artistique. Comment on imagine les personnages, comment on adapte les situations de la vraie vie qui ont constitué cette source inépuisable d’inspiration, comment on coordonne les artistes qui permettent à ces créations d’exister.
Bonne écoute, et bonne lecture !
#lanouvelleolympe #podcat #chatventures #soutenonslesbonnesidées